Au Paradis des Muses

 

« L'érotisme fait peur parce qu'il excelle dans l'excès, s'épanouit dans la surabondance et l'illimité.

Il élève l'instinct au rang d'un art d'aimer, et donc de vivre. » (Sophie Chauveau)

       

Les mots ont leur importance. Ils portent nos images et orientent nos comportements. Ils révèlent aussi nos valeurs et nos choix (j’évite volontairement le mot morale).

 

Il m’arrivait d’être embarrassé lorsqu’on me demandait qui était cette amie avec laquelle j’avais des relations sensuelles et illégitimes. Par jeu, j’ai répondu un jour qu’il s’agissait d’une muse. J’ai conservé ce mot pour son allure poétique et mythologique. Mais pas seulement. Mes amies complices de jeu éveillent souvent en moi des pulsions sexuelles autant que créatives. C’est à mes yeux un des aspects les plus précieux de la rencontre. Rien n’est plus délicieux que de mélanger les plaisirs de la chair et ceux des lettres, ou plus largement des arts quels qu’ils soient. Bienheureux les fous qui font l’amour avec les mots, bienheureuses les belles dont les grâces inspirent des sonnets et des partitions…

 

Lorsqu’on me dit qu’il s’agit d’une maîtresse, ma première réaction est de rejeter ce terme. Pour moi cela suppose une relation entretenue, c'est-à-dire plus ou moins régulière et prolongée ainsi qu’une certaine forme d’engagement parallèle à une vie conjugale et socialement légitime. Or je vis avec une femme que j’aime et avec laquelle je suis marié. Même si le mariage ne signifie pas grand-chose pour moi en tant qu’institution, j’ai voulu et j’ai choisi de m’engager auprès de cette femme. Je ne cherche pas à avoir une seconde épouse clandestine. Ce serait pour moi un manque de cohérence dans mon engagement marital et j’aurais alors le sentiment de trahir ma propre parole. Au fond, je crois sans doute qu’on n’a jamais qu’un seul grand amour. Ma femme a du réussir à me le faire croire.

Voilà pourquoi je considère que je n’ai aucune maîtresse.

 

En revanche le terme d’amante me plait beaucoup parce qu’il résonne en moi différemment. En premier lieu n’oublions pas que deux amants sont « deux personnes qui s’aiment », étymologiquement. Ils s’aiment corps et âme peut être mais rien ne semble indiquer qu’ils s’engagent d’une manière prolongée l’un vis-à-vis de l’autre. Ce mot me semble à la fois plus léger et moins réducteur. Je crois qu’il peut y avoir des amants d’un jour et des amants pour la vie. Ne rêvons nous pas d’un amour idéal entre deux éternels amants ?

 

Le terme d’amant(s) indique une forme de liberté, cette liberté là précisément que je chéris parce qu’elle sait aimer sans dépendances, sans jalousies, sans possession. Cette liberté si difficile à conquérir et qui nous excite tant parce qu’elle est l’érotisme même. Cette liberté des amants qui définit aussi l’essence du libertinage, cet esprit si précieux parce qu’il est à nos yeux l’une des formes les plus nobles de l’amour et du plaisir. Cette liberté que je n’ai pas trouvée dans mon couple légitime… Cet esprit partagé avec quelques muses-amies-amantes qui ne seront jamais mes maîtresses ni de futures épouses.

 

Enfin ce terme est beau parce qu’il me parle d’amour, contrairement au mot maîtresse qui peut laisser supposer une dépendance, une addiction, une hiérarchie, voire une forme sournoise de pouvoir. Je reconnais cependant qu’il y a une certaine noblesse dans la notion de respect que sous entend le mot maîtresse. Ce mot semble accorder un statut supérieur à la personne concernée. Cette posture d’esprit me parait légitime tant qu’elle valorise la personne et non le statut. Il reste pourtant difficilement acceptable pour moi. Dans mes rapports humains, je m’efforce de cultiver chaque lien pour qu’il conserve sa nature unique et sa valeur propre. Et je m’interdis de hiérarchiser ou de mettre en concurrence mes amitiés ou mes amours. Tout comme je n’ai jamais classé ou noté, ni même compté, les personnes que j’apprécie. Je les aime de manières différentes mais pas plus ou mieux. Cela n’aurait aucun sens pour moi.

 

Et vous, mesdames, au masculin, comment désignez vous celui ou ceux qui goûtent aux joies des sens en votre compagnie en dehors de votre doux foyer ? Quelques unes me répondront « mon Maître », je le sais d’avance, mais c’est un cas un peu particulier. Dites-vous « mes amants » « mes chéris » « mes amoureux » « mes 5 à 7 »… ? Utilisez-vous un mot étranger, ou un mot inventé ?


   
    © DGC 10 2007
Illustration  : Yslaire
 
Mar 30 oct 2007 14 commentaires

mes boyfriends ... of course.

Flore - le 31/10/2007 à 09h35
Yes, c'est évident ! (euh... boys only ?)
Anonyme

j\\\'adore ce sujet, très certainement parce que j\\\'y adhère complétement !


le terme amant me plait beaucoup, je dit bien terme et non qualification, parce que chacun d\\\'eux à un autre "petit nom".


En fait je les aime différemment, parce qu\\\'ils sont différents... et ils méritent donc un "nom" rien que pour eux !


Alors j\\\'ai un "mon électron libre", un " mon délicieux", un "mon nounours" (oui je sais c\\\'est un peu limite), un "mon amoureux", un "mon poète", un "mon précieux"....


KISS

Cherry - le 31/10/2007 à 09h36
Un nom pour chacun d'eux...
Oui il m'arrive aussi de baptiser mes muses, j'aime beaucoup faire ça, surtout si c'est demandé avec élégance, mais ça reste secret !
Anonyme

Joli texte qui touche forcément l'amante que je suis, et la maîtresse que je ne veux pas être et que je ne suis pas...


Ta distinction est très juste et je la vis comme ça!


 


Pour moi, ils ont tous un prénom. Parfois, ils sont mon amant, mon aimant (force d'attraction oblige!), mon bel inconnu,  l'un est "Lui", l'autre est "l'Autre"... Mais ils sont chers à mon existence, peu importe le nom donné, tous bien distincts. Parce que tout est différent, parce que chacun est unique.

Fée d'Hiver - le 31/10/2007 à 11h57
J'aime beaucoup ton idée d'Aimant.
Cela rejoint l'Electron Libre de Cherry.
Très magnétique en somme, et à l'image de nos passions !


Anonyme

mon complice


mon amant


mon secret


voir pour autrui "heu c'est un ami"


rire

marie - le 31/10/2007 à 14h31
Marie, quelle joie de te retrouver !
Tes secrets : j'adore !
Anonyme

Je n'ai pas eu d'aventures illégitimes comme on les appelle.


Je n'ai eu que des "Elus" pour les plus importants d'entre eux. "L'Elu" j'aime assez ce mot.


Alors oui "L'Elu" peut l'être dans la durée ou dans son aspect éphémère. Mais tout est dans l'instant où cet homme m'a donné l'envie de son unicité.

AC - le 31/10/2007 à 15h26
Chère  A-C, la connotation d'Elu est fort noble !
On dit d'ailleurs "l'élu(e) de son coeur". 
Et si celui-ci sait goûter à l'instant... tu dois être servie comme une reine !
Anonyme

Avant tout bravo pour cette disertation sur la définition des mots maitresse et amante. c'est vrai que d'un point de vue purement sémantique la nuance est purement sexuel ! et paradoxe la maitresse est celle qui entretient une "relation" avec un homme, alors que l'amant est un "partenaire sexuel" !


enfin pour ma part, je pense que le mental est plus important que le physique. Je suis d'acord avec vous lorsque vous dites : "Mes amies complices de jeu éveillent souvent en moi des pulsions sexuelles autant que créatives" c'est pourquoi je crois que le mental pimente le physique et non l'inverse.


J'ai gouté par le passé aux plaisirs du libertinage mais je m'en suis vite lasser car seul l'aspect sexuel de la rencontre avec l'autre prevalé, relation intense mais fade voir parfois aux limites de la bestialité.


Aujourd'hui je suis plutôt dans une démarche de "compagnon de route", ou chacun mêne sa vie de son coté en gardant toujours une place pour l'autre. Une place d'écoute, d'échange, de confidence, et de plaisir charnel. j'ai rencontré recement une femme avec qui nous avons entretenu une correspondance quasi quotidienne depuis plusieurs semaines. Je n'ai pas reflechi à ce qu'elle pourrais être pour moi, mais cela me fera un bon sujet de reflexion pour ce soir et je reviendrais vous dire comment je la nomme !


Tophe - le 31/10/2007 à 20h25
J'appelais aussi celle qui allait devenir ma femme "ma compagne" parce que notre relation était aussi sensuelle qu'amicale tant nous partagions nos confidences et nos points de vue. Ce terme disait bien la liberté que nous cultivions l'un envers l'autre.
J'aime aussi cette idée de fraternité charnelle avec une personne que l'on a choisi, (pour quelques heures ou quelques années.)
Merci de ta visite, sois le bienvenu ici.
Anonyme
J'utilise le mot "amant" pour tous les gens qui aiment les mêmes choses que moi et pas seulement le sexe, celà peut être l'écriture, la lecture, la peinture, le théâtre.

Pour ceux qui ont une place dans mon coeur, ils ont chacuns leurs petits noms et par un pronom possessif, j'accentue la tendresse que j'ai pour eux.

Toi avoir compris mon Did-doux ?
Multi-sourires alias ta cissou
Multi-sourires - le 31/10/2007 à 23h05
Ma Cissou, tu sais parler aux hommes !
"Amant de jeux d'écriture"... c'est un très joli terme, à n'utiliser qu'en cercle restreint (et vicieux évidemment).
Anonyme

J'ai longtemps cherché l'équivalent de muse au masculin et, guidée par cette note, je me suis dit que le Maître de ce site inspiré pourrait m'apporter une réponse.....

sélÚne - le 04/11/2007 à 22h43
Je n'ai malheureusement pas de réponse à te donner, chère Sélène. Le plus proche synonyme me semblerait être "inspirateur", tellement moins poétique. Je vais faire quelques recherches approfondies sur ce sujet. ... à suivre, donc.
Anonyme
Démons.
Madame B - le 05/11/2007 à 21h59
Parfait !
Anonyme
:)
Madame B - le 12/11/2007 à 18h11